Aux fins fonds du nord du Laos

26/02/2008 11:47

Deja presque 10 jours que nous parcourons le nord du Laos. Ici la vie est plutot rurale, et nous sejournons dans des petits villages qui ne beneficient de l'electricité que pendant 2 ou 3 heures chaque soir. Alors les ordinateurs et internet sont ici des facilites presque toujours inexistantes! Mais nous allons essayer de vous resumer tout ca...
Nous avons quitte le territoire thailandais en traversant le Mekong entre les deux petits villages de Chiang Kong (Thailande) et Houesay (Laos). Passage de frontiere facile et sans encombre. Quelques dollars pour le visa, quelques bahts (monnaie thailandaise) de backchich parce qu'on était samedi et hop! dans la poche! Nous avons mis le cap dès le lendemain sur Luang Nam Tha puis Muang Sing, dans les montagnes a quelques kilometres de la frontiere chinoise. Le trajet, dans un premier temps a bord d'un minibus antique (plus aucun compteur ne marchait et le conducteur coupait le moteur dans les descentes... moi qui comptais sur le frein moteur pour nous retenir :-) puis à 16 entassés sur 2 banquettes à l'arrière d'un pick-up, nous donne l'occasion d'avoir un premier apercu de la vie quotidienne dans les campagnes laotiennes.

Ambiance brumeuse des montagnes a la frontiere chinoise : foret de bambous et grande balancoire Akha

Le pays garde quelques stigmates discrets de la colonisation francaise : on retrouve la conduite à droite, et les bornes kilométriques arrondies le long des routes nationales. Dans les villages, les laotiens "tirent et pointent" sur les boulodromes, les panneaux administratifs bilingues Lao-Francais annoncent les bureaux de poste, les écoles ou les banques, et enfin, ce qui est loin de nous déplaire, la baguette dorée et croustillante se vend à tous les coins de rue! La route traverse de nombreux villages : maisons sur pilotis, cloisons de bambou tressé, toits en feuilles de roseau. Le petit bois pour le feu est soigneusement entassé sous les pilotis, du linge coloré sèche sur les balcons. Il y règne toujours une vive animation : jeux d'enfants, scènes de vie ménagères ou agricoles, aboiements, gruik-gruik des cochons, pépiements des volailles.

Des bebes partout et de toutes les especes!

Avant ou après les villages, le long de la route, sont alignés des petits greniers à riz sur pilotis, où sont entreposés des potirons, et des gerbes de fannes séchées. De temps en temps, un buffle traverse la route. Le paysage est montagneux, couvert de foret tropicale dense, et il fait de plus en plus froid! Ambiance rustique, très authentique (surtout comparée à la Thailande), et joyeuse. Le Laos est un des pays les plus pauvres du monde. 2 fois moins d'habitants que Paris pour une surface grande comme la Grande Bretagne. Il semble que le pays, parti en retard sur ses voisins, essaie de developper le tourisme sur un modele plus durable. Partout on peut voir de grands panneaux pedagogiques a destination des farangs (etrangers) expliquant ce qu'on peut et ce qu'on ne peut pas faire, dans le respect des us et coutumes du pays. Des guides locaux sont formes par les offices du tourisme et une partie de la prestation est reversee aux villages ethniques visites. Tres eco-ethno travel tout ca! On adore... Nous sommes partis en trek avec un guide Hmong, pour 7 heures de marche dans la montagne brumeuse, en traversant des villages Hmong et Akha de differents groupes (reconnaissables a leur coiffe legerement differente). Certaines communautes ont ete deplacees des hauteurs jusque dans la vallee, pour les inciter a arreter la culture du riz de montagne sur brulis et lutter contre la culture du pavot. On les encourage maintenant a cultiver la canne a sucre, le riz innonde et l'hevea. Les chinois achetent toutes les matieres premieres (canne, caoutchouc...) et debarquent a grand renfort de camions dans la region. Les Laos restent donc des paysans cultivateurs et ne transforment rien. Tous les produits manufactures sont importes de Thailande ou de Chine. Le deplacement des ethnies minoritaires provoque cependant quelques problemes : c' est pour eux un bouleversement. De nomades ils doivent se sedentariser, et sont confrontes dans les vallees a la malaria, qu'ils ne connaissaient pas sur les hauteurs. Si la culture sur brulis entraine une deforestation certaine, les volumes ne sont pas comparables a ceux du commerce de bois exotique, cautionne par le gouvernement! Dans les villages, malgre la grande pauvrete, la brume et le froid saisissant, la vie est prolifique. Les mamans ont de nombreux bebes, les poules promenent derrieres elles une floppee de poussins, les porcelets detalent poursuivis par les chiots, et les cannetons suivent debonairement leurs aines dans les allees poussiereuses (pour info, les chiens sont eleves pour la chasse...et surtout la soupe!).

Village Akha des montagnes : pauvrete, culture du riz de montagne sur brulis, et de l'opium (chut faut pas l'dire!)

Les femmes portent la coiffe traditionnelle, souvent protegee d'un fichu colore, et distribuent des sourires rougis par le betel. Les hommes ont des visages durs, la machette ou le fusil a la main. Meme si nous ne sommes aucunement menaces, on sent bien que ce sont des "guerilleros"... La region est une des plus grosses productrices d'opium, mais c'est un sujet tabou, que nous n'arrivons pas a developper avec notre guide... Sur l'arche qui protege le village des mauvais esprits, sont accroches des kalachnikovs et des grenades en bois! Pourtant on ne lutte pas contre les esprits avec des armes a feu! Ca doit tremper dur dans le traffic tout ca!!! Dans l'ecole, le jeune prof gere avec peine 3 niveaux simultanes et 3 tableaux noirs... pour enseigner le Lao a une partie des enfants du village (ceux dont les parents on de quoi payer un cahier et un crayon). Partout, on file, on tisse, on tresse le bambou, on noue les feuilles de roseau sechees sur des claies pour les toits.

Rencontres fortuites et emouvantes

Dans une cabane en bambou, les hommes se reunissent en conciliabule bruyant et boivent du Lao-Lao (alcool de riz, boisson nationale). Sur le point culminant du village, une haute balancoire de bois rudimentaire est dressee, en prevision du prochain "festival des balancoires". A cote de la case parentale, on construit une petite cabane de bambou pour que la jeune fille de la famille puisse cohabiter avec son fiance avant le mariage, histoire de tester la cohesion du couple. Si ca marche, ils se marient, sinon, ils choisissent quelqu'un d'autre! Les points d'eau (fontaine ou riviere) sont toujours tres animes> Les femmes s'y lavent protegees d'un long sarong, ou font la lessive, puis les hommes prennent leur tour en slip kangourou de marque "Piranhia" (ca doit etre le DIM national :-)
Nous croisons egalement quelques villages Yaos, dont les hommes entretiennent une tradition d'ecriture en caracteres chinois. Les femmes Lao Lu, quant a elles, sont reconnaissables a leur chignon et fabriquent de larges nouilles de riz. Les enfants jouent aux billes avec des graines de tamarin, ou au badminton avec un volant forme d'une douille empesee de plumes. Les ados s'exercent au Katow, une sorte de beach volley ou l'on ne doit toucher la balle en rotin qu'avec les pieds, les hanches, les genoux et la tete.

Jeux d'enfants

Nous avons elu domicile dans une petite guesthouse tres simple au milieu des rizieres et parcouru la campagne et les villages alentours a pied, en solo. Belles rencontres, belles tranches de vie authentiques sans que jamais le rapport commercial ne pointe son nez. Notre presence ne semble pas perturber la vie du village. Un sourire et les gens continuent de vaquer a leurs occupations. Pas d'artisanat. Juste quelques fois une invitation murmuree a fumer de l'opium (ben j'croyais qu'ils n'en cultivaient plus!!:-)